Après avoir listé dans le plus grand secret les réfugiés vivant sur leurs territoires, les services spéciaux d’Ouzbékistan et du Kirghizstan ont conclu un accord sur leurs extraditions respectives vers l’un et l’autre pays.
En avril 2015, lors d’une rencontre
à huis clos, les représentants des services spéciaux d’Ouzbékistan et du
Kirghizstan ont approuvé une liste de personnes vivant dans l’un et l’autre
pays et faisant l’objet d’un avis de recherche. Ces renseignements ont été
délivrés par une source fiable au Kirghizstan s’étant illustrée jusqu’à présent
par la transmission d’informations justes et vérifiées.
Nombreux sont les réfugiés inscrits
sur cette liste qui sont en droit de bénéficier d’une protection selon les
critères définis par la Convention des Nations unies relative au statut des
réfugiés.
L’Ouzbékistan a demandé à son voisin
kirghizstanais l’extradition de réfugiés, originaire du Karakalpakstan
(République autonome d’Ouzbékistan). Les autorités ouzbèkistanaises considèrent
que ces derniers sont des “séparatistes” dans la mesure où ils s’affirment en
faveur de l’indépendance du Karakalpakstan. Plus de cinquante Karakalpaks
vivant actuellement au Kirghizstan sont menacés d’extradition. En cas de retour
forcé en Ouzbékistan, ils seront torturés, soumis à de longues peines
d’emprisonnement, et/ou tués. Leurs proches et les personnes avec lesquelles
ils ont pu entretenir une quelconque relation jusqu’à leur émigration, se
trouvent actuellement en prison ou sont soumis à une étroite surveillance des
services spéciaux ouzbékistanais.
Le Kirghizstan a requis en échange l’extradition d’Ouzbeks
(par leur appartenance ethnique) ayant la nationalité kirghizstanaise,
poursuivis pour avoir participé aux évènements de Och en juin 2010. Près de 100
Ouzbeks originaires du Sud du Kirghizstan vivent actuellement en Ouzbékistan.
En cas de retour forcé au Kirghizstan, ils risquent d’être soumis à des actes
de torture, d’être emprisonnés à vie, si ce n’est d’être tués, tandis que leurs
biens seront confisqués, et leurs proches discriminés pour leur appartenance
ethnique. Au Kirghizstan, les juges et
les avocats sont systématiquement soumis aux pressions du pouvoir, des
nationalistes et du crime organisé. Dans ce contexte, les Ouzbeks
kirghizstanais sont dans l’impossibilité de bénéficier d’un procès juste et
impartial, comme le montrent les procès d’Azimjon Askarov, de dilmourad
Khaïdarov, de Mirzakhid Vakhabjanov et de bien d’autres encore.
Tous les Ouzbeks qui ont quitté le Sud du Kirghizstan sont
soumis depuis les évènements de Och, cinq ans auparavant, à une surveillance
étroite de la part des Services nationaux de sécurité ouzbékistanais (SNB).
Leur liberté de mouvement est restreinte et leurs tentatives de légaliser leur
statut se révèlent impossibles dans la mesure où le SNB leur a confisqué leur
passeport. Par leur situation, ce sont des réfugiés. Ils ont quitté leur pays
car ils étaient menacés de mort suite au conflit interethnique dans le Sud du
Kirghizstan, et vivent désormais en Ouzbékistan illégalement. Cependant, les
autorités ouzbékistanaises ne les autorisent pas à légaliser leur situation, et
les placent dans une situation de dépendance totale vis-à-vis des décisions
prises par les différentes institutions publiques, sans que les organisations
internationales et les observateurs indépendants ne puissent intervenir.
Dans le cas où ces réfugiés seraient échangés et extradés,
le Kirghizstan et l’Ouzbékistan démontreraient encore une fois leur absence
totale de volonté concernant le respect de leurs engagements internationaux
dans le domaine des droits
de l’homme, et la garantie des droits fondamentaux.
L’Association des
Droits de l’homme en Asie centrale exhorte les acteurs suivant à intervenir
dans cette situation :
— le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme
— le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés
— le Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture
— le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe
— Représentant spécial de l’Union européenne pour l’Asie centrale
L’Association des Droits de l’homme
en Asie centrale en appellent à toutes les missions diplomatiques et aux médias
d’informations pour faire cesser les extradition de masse de réfugiés vers leurs
pays d’origine, où ils sont menacés de mort. Elle les exhorte à faire tout ce
qui est en leur pouvoir pour que le statut de ces personnes, qui nécessitent
d’une protection internationale, soit légalisé.
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